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Publié par jjlatouille

Alors que la police, organe de la sécurité du pays, est en rébellion depuis plusieurs jours, le président de la République se terre dans le silence et part en vacances. Quelles significations faut-il voir dans cette attitude, quel risque peut-on supposer pour la République et la démocratie ?

Au Niger une junte (militaire, par définition) a pris le pouvoir et retient le président de la République prisonnier en son palais. En France, alors que la police défie les institutions, plus particulièrement la Justice, et met à mal le principe de séparation des pouvoirs qui est un des principaux piliers de la démocratie, le président de la République se terre dans un silence inquiétant pour le pays qui est désormais en droit de se demander : où est le président ?

Alors que la France vit une situation sociopolitique difficile, de nature à mettre en cause sa cohésion ainsi que son fondement républicain et démocratique, le président est en vacances. Certes personne doutera de ce qu’il a emporté des cahiers de vacances et qu’entre deux coloriages il se penchera sur le désarroi du pays : quelle image donne-t-il de l’intérêt qu’un président doit porter aux citoyens, et quel manque de respect pour la fonction que le peuple lui a confiée !

Nous aurions pu espérer que le ministre de l’Intérieur prit le relais pour rétablir l’ordre républicain qui lui est si cher. Nenni, il est en vacances lui aussi après avoir pris fait et cause pour les policiers.

Qui au sommet de l’Etat va rappeler les règles de conduite de chacun dans un Etat républicain et démocratique ? Alors qu’il aurait dû sanctionner le directeur général de la police nationale pour les propos innommables et antirépublicains, qu’il a prononcés en soutien inconditionnel aux policiers en rébellion, le ministre de l’Intérieur l’a approuvé, et le président de la République, entre deux avions, a distillé quelques propos creux, incohérents et sans impact. Donc, les policiers continuent leur mouvement de contestation qui quoiqu’ils en disent est surtout tourné contre une décision de justice et contre l’institution judiciaire. Certains syndicats de policiers manifestent là leur hostilité à la Justice et leur attachement à l’exercice, sans contrainte, de la force ; combien entend-on nous que les policiers détiendraient la légitimité de la violence ce qui est un dévoiement dangereux de la théorie émise par le sociologue Max Weber. À moins qu’en se parant de la légitimité de la violence les policiers, soutenus en ça par tout ce que les partis politiques de la droite la plus extrême ont de plus virulent et d’antidémocratique, ils n’expriment comme le ferait une junte leur volonté d’accéder au pouvoir soit en s’emparant de la tutelle du pays soit en encadrant les actes du président de la République. Ce serait alors un coup d’État !

Le mutisme du gouvernement et des parlementaires Renaissance (le parti du président de la République) ou, quand ils s’expriment comme un député Renaissance de l’Hérault, leur volonté d’excuser voire de soutenir le mouvement de revendication montrent que pour le moins, sans être (pas encore) prisonniers des mutins, ils en ont peur. Quant au ministre de l’Intérieur, qui soutien le mouvement des policiers, il semble endosser avec satisfaction les habits de Brutus. En présence d’un président de la République, marionnette du « grand capital », sans beaucoup de consistance politique et qui dépourvu de charisme comptait sur sa séduction de narcissique pour gouverner, seules la force et la brutalité pouvaient maintenir les gens dans le cercle de soumission où les gouvernants voulaient les contraindre : ce furent les Gilets Jaunes, les manifestants contre la réforme de retraite, les mouvements écologistes, les récentes émeutes qui eurent à supporter les massacres organisés par l’Etat, et qui, acceptant au passage quelques poignés de cacahuètes sont, sous la contrainte des matraques et de grenades, docilement rentrés à la maison. Il fallait un maître d’œuvre de la répression : ce fut le 3e ministre de l’Intérieur des quinquennats depuis 2017. Mais il a tellement exigé des troupes qu’aujourd’hui elles sont épuisées et qu’il ne sait pas comment contenir la colère issue de cet épuisement.

Les troupes sont épuisées par un rythme de travail épouvantable, par des conditions de travail innommables, par des salaires très nettement insuffisants voire dérisoires au regard de la mission et surtout, pour une grande partie des policiers, un travail en opposition avec leurs valeurs et leur éthique professionnelle. C’est sur cet humus de mécontentement que les syndicats et les partis politiques « extrêmes » ont posé les graines d’une déstabilisation des institutions du pays, confortés par un ministre qui les soutient et les encourage, trop content de voir là l’opportunité d’un accès au poste de Premier ministre et son image grandir à tel point qu’il serait présidentiable en 2027. Ainsi, le ministre endosse les habits de Brutus face à un président désormais nu comme le Roi.

Le président est nu, d’abord parce que depuis 2017 il s’isole de plus en plus, ensuite parce qu’aujourd’hui il a peur autant de son ministre que des policiers. Alors il cède aux extrêmes les plus « bruns », les plus autoritaires ; il l’a fait notamment en évinçant le ministre de l’Éducation nationale, Pap Ndiaye, dont la tête était demandée par l’extrême droite (autant celle déclarée que celle fallacieuse), il l’a fait, pour satisfaire le « grand capital » avec l’ensemble de ses réformes « sociales » qui n’ont de sociales que l’étiquette usée qu’il leur attribue mais qui représentent un jeu de massacre du système social de solidarité et de cohésion de la société française lentement élaboré entre 1789 et 1946… Lui qui rappelait aux parents leurs responsabilités en leur demandant de faire preuve d’autorité, n’a aucune autorité ni charismatique ni factuelle alors il se terre, derrière les murs d’un fort, en vacances, et sous un verbiage de plus en plus insupportable.

Au fil du temps, révélant sans doute sa vraie nature, le président de la République a jeté le pays dans le lit de l’extrême droite, aidé par une gauche de plus en plus inexistante, noyée dans l’excentricité et les querelles d’ego, soutenu par une presse aux ordres du « grand capital » qui rêve de retrouver une France soumise comme au XIXe siècle, une presse où les syndicats de policiers d’extrême droite disposent d’un bureau et parfois d’une chambre à coucher, et plébiscité par une partie de la population qui frémit devant chaque mouvement de foule apeurée à l’idée qu’elle pourrait voir son épargne et ses privilèges écornés. Faute d’avoir révoqué le directeur général de la police nationale, faute de rappeler avec fermeté leurs obligations aux policiers, le président de la République montre clairement qu’il est sous l’emprise des « sauvageons putschistes » de la police et qu’il ouvre les bras à un gouvernement d’extrême droite.

Comme au Niger, en France le président de la République ne gouverne plus !

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